Racha Baroud

Dans Deaf Tones in G Minor, Racha Baroud et Kinda Hassan proposent une création sonore performative, un temps suspendu dans le fracas de l’Histoire. Dans un espace façonné par les sons et les silences, les deux artistes créent une zone fragile, un interstice entre l’effondrement et la reconstruction.   

À l’automne dernier, alors que le sud du Liban est de nouveau ravagé par les conflits, Racha Baroud rejoint Tyr, sa ville d’origine, dès l’annonce du cessez-le-feu, puis gagne les environs de Naqoura, où se situe sa maison familiale, à quelques kilomètres de la frontière israélienne. Dans la banlieue sud de Beyrouth, elle arpente à plusieurs reprises des rues, comme autant de marches funèbres, démunies face à l’ampleur du chaos. De cette sidération naît l’urgence de Deaf Tones in G Minor, un projet forgé dans le silence imposé par la guerre, dans la nécessité de traduire par le corps et la voix ce que les mots ne peuvent plus dire. En collaboration avec la compositrice Kinda Hassan, elles imaginent une traversée sonore où le monde vacille. Les bourdonnements persistants des drones, les échos lointains des passages d’avions, les secousses discrètes des impacts, mais aussi les silences suspendus, rythment un espace en mouvement. À travers ces vibrations et ces absences, les sons s’infiltrent dans l’air, se déposent sur les corps, impriment la trace des attentes, des pertes et des recommencements. Deaf Tones in G Minor laisse vibrer ce qui reste après l’effondrement : un souffle, une attente, un battement persistant.